mercredi 6 février 2013

Chapitre 12 - Une certaine vision des choses


Cela faisait cinq minutes que Lily dormait contre lui. Ou peut-être dix. Qu'importe, il était bien et il se sentait capable de passer sa nuit à la tenir contre lui comme ça. Enfin, en y réfléchissant, peut-être pas la nuit, il craignait un peu la réaction de sa douce une fois réveillée. Et puis, passer la nuit dans ce bain n'allait être agréable ni pour lui ni pour elle. Il décida alors de se lever délicatement en tâchant de la garder fermement collée à lui, puis il se dirigea vers la salle de douche pour récupérer sa baguette. Sirius et lui, en grands fainéants et en bons champions du réveil raté, avaient appris un sort très pratique qui permettait de s'habiller par magie. Pas besoin de bouger, les vêtements prenaient place automatiquement sur son corps, il suffisait simplement de les toucher avec sa baguette. C'était de toute façon un sort à apprendre pour être Auror car il fallait pouvoir enfiler en une seconde l'uniforme qui bénéficiait d'une protection particulière. James habilla aussi la jeune Gryffondor de cette manière et se félicita de ne pas avoir cédé à l'envie de regarder et caresser son merveilleux corps.

Il se dirigea vers la chambre des préfets-en-chef de Gryffondor, se demandant déjà s'il resterait pour la regarder dormir. Pour la première fois de l'année, il regretta d'avoir fait jouer ses relations pour échanger sa place de préfet-en-chef avec Remus. Ça lui aurait servi une excuse parfaite pour rester. Arrivé devant le tableau de nains chantants joyeusement, il prononça le mot de passe et pénétra dans le salon. Toujours aussi bien rangé, à quoi d'autre pouvait-on s'attendre de la part de Lily et Remus ? 

James pénétra dans la chambre de la jeune Evans, le rouge aux joues, gêné d'entrer dans l'intimité de Lily sans y être convié, comme un voleur. Il se rassura en se disant qu'il ne ferait que la déposer dans son lit ; il ne fouillerait ni n'inspecterait sa chambre, il n'irait même pas dans sa commode pour lui chercher quelque chose de plus confortable pour dormir. Il coucha la jeune femme très lentement, admirant sa mine sereine. James se plaça à coté d'elle, à une distance raisonnable, sur un coude. Les rayons de lune lui donnaient un air angélique, tout comme ceux du soleil quand il y pensait. Il se rendit compte qu'à ses yeux, elle rayonnait à tout instant. Plus les minutes avançaient, plus sa tête était lourde. Bientôt son coude céda sous ce poids et le sommeil décida de l'assommer pour de bon.

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Quelque chose de doux effleura son front. Il lui sembla avoir déjà senti cette chose auparavant. Par réflexe, il ne bougea pas et attendit. La douceur descendit sur sa joue gauche, arriva jusqu'à son menton, caressa sa bouche, visita son cou et revint vers son front. La chose continuait d'effleurer son front quand une autre douceur plus tiède se posa sur ses lèvres, avant de se retirer. La sensation était si brumeuse, presque imaginaire. Mais James n'en était plus à se poser des questions, peu importe la nature de ce qu'il sentait, ça le détendait.

Un vague chuchotement parvint à ses oreilles, les phrases s'entremêlaient, il ne comprenait rien puis, le rythme ralentit et il reconnut la voix de Lily, claire comme le son du cristal lui dire avec une émotion presque douloureuse : « Je t'aime James ».

Cette révélation lui fit ouvrir les yeux et il se releva brusquement. Lily était à coté de lui, assise, le regardant intensément. Elle souriait doucement. Il n'en revenait pas, depuis combien de temps ne l'avait-il pas vue sourire ?

En examinant de plus près l'environnement, il remarqua qu'il n'était plus dans la chambre de Lily mais dans une chambre qu'il ne connaissait pas. Elle était décorée avec goût, un joli bleu ciel colorait les murs. Une petite commode, une coiffeuse et le lit formaient un mobilier blanc et plutôt baroque. La couverture de lit était d'un bleu pâle très soyeux. Avant qu'il n'ait pu analyser quoi que ce soit d'autre, la jeune Evans s'était mise sur lui et l'embrassait passionnément pendant que sa voix résonnait dans la tête de James. 

« Je t'aime, oui, mais je ne te mérite pas. »

« Nous ne pouvons plus être tous les deux »

« Pardonne l'égoïste que je suis »

« Merci »

Puis elle mit fin à leur baiser, se leva du lit, ouvrit la porte de la chambre et s'en alla. Le jeune homme essaya de la rattraper mais la porte avait disparu. Il prit une massue et démolit le mur en face de lui, furieux. Toute la chambre s'effondra et la sensation de chute le gagna.

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La sensation de chute finie, James ouvrit les yeux et se releva vivement, encore une fois. Ses yeux s'habituèrent à la pénombre et il découvrit avec soulagement qu'il était dans la chambre de préfète-en-chef de Lily. Il tourna automatiquement la tête vers elle pour la découvrir, endormie et tournée de l'autre côté, dos à lui. Il jeta un regard furtif au réveil sur la table de chevet, il était cinq heures passé. Le beau gryffondor soupira et se tourna encore une fois vers Lily. Quel drôle de rêve et le plus étrange c'est qu'il s'en souvenait très distinctement, ce qui n'était pas du tout dans son habitude. Il effleura l'épaule de la jeune fille distraitement, sachant pertinemment qu'il devrait y aller bientôt. Il ne souhaitait vraiment pas être là, à son réveil. Elle le vivrait très certainement comme une agression. Il était conscient que c'était sûrement le dernier écart qu'elle s'autoriserait à faire. Ne pas savoir si c'était sa réelle volonté qui la poussait à être avec lui le rendait fou. 

Pourquoi s'accrochait-il ?

Pourquoi ses espoirs se nourrissaient de cette éventualité ? 

Parce qu'elle lui faisait perdre la tête. Et pire encore, quand il était tout près d'elle, quand elle le laissait l'embrasser, elle ne semblait pas du tout souffrir. Tous ses gestes le recherchaient, ses attitudes, sa façon de pencher la tête pour approfondir leur intime baiser chargé de sens. 

Pourquoi ne l'avait-elle pas repoussé, pourquoi avait-elle caressé son torse ?

Pourquoi s'était-elle enroulée autour de lui ? 

Pourquoi s'était-elle accrochée à lui quand il voulait juste la laisser respirer ?

Pourquoi s'entêtait-il ?

Pourquoi ne pouvait-il pas être comme tous les autres garçons de dix-sept ans ? 

Un mouvement de Lily le fit sortir de ses réflexions. Il devait y aller. Il se leva délicatement et partit de cette chambre. Il se retrouva rapidement devant le tableau de la Grosse Dame. Il souhaitait rattraper sa nuit et surtout se sortir ce rêve et cette soirée de la tête. Ou plutôt ce qui allait se passer après cette soirée.

Une fois franchi le tableau, deux masses sur le canapé près du feu attirèrent son regard. Il s'avança et reconnut les chevelures dorée et noire encre de ses deux meilleurs amis. Il les secoua rudement en soupirant ; il savait qu'il allait devoir expliquer son absence.

          _ Mec ? T'es enfin revenu ? marmonna Sirius, un œil à peine ouvert.

          _ Non, c'est Merlin ! Bien sûr que c'est moi, andouille !

          _ Mais où étais-tu passé ? demanda Remus, empêchant Sirius de répondre en lui mettant la main sur la bouche pendant que l'autre frottait ses yeux.

          _ Je vous l'ai dit, je suis allé me doucher...

          _ C'est ça Cornedrue, toi tu prends des douches de plus de dix heures ! s'exclama le jeune Black, hilare.

          _ Non, effectivement, je n'ai pas fait que ça... J'ai aussi trouvé Lily nue dans le bain et je l'ai embrassée, avoua-t-il en résumant sa soirée.

Les deux Maraudeurs eurent l'air estomaqué. James esquissa un sourire ; il aurait sûrement réagi pareil à leur place.

          _ Juste l'embrasser ? Alors qu'elle était nue ?! s'étonna Sirius.

          _ Je n'ai pas envie de lui faire l'amour comme ça, dans cette situation, ne sachant pas si ses rêves l'influencent d'une manière ou d'une autre.

          _ Tu crois qu'ils l'influencent ? 

          _ Je ne vois pas d'autre explication, soupira-t-il, le comportement de Lily est complètement contradictoire. Un jour elle me dit qu'elle me haït, elle me rejette, je vois du dégoût dans ses yeux et ensuite je l'attire suffisamment pour qu'elle me laisse l'embrasser. Elle répond à mes baisers, je ne l'emprisonne pas. Elle me collait une gifle ce soir et je ne demandais pas mon reste, je m'en allais. Je ne l'ai jamais vue aussi perdue. Sept ans qu'elle avait à peu près la même attitude, elle me rejetait, me traitait de prétentieux et basta. Ensuite, en début d'année, elle se met à vouloir que nous parlions comme deux êtres civilisés et on s'est même suffisamment rapprochés pour que je l'embrasse. Jusque-là, rien de bizarre, juste une fille qui se rend compte qu'elle m'a peut-être mal jugé et qui, enfin, réalise un de mes vœux les plus chers. Mais tout s'est emballé après ce passage à l'infirmerie, après ce rêve, ces rêves, cette possession. Mon instinct me dit qu'il y a un lien entre son comportement et ses rêves. 

          _ Mais, comment tu fais James ? questionna Patmol, moi je ne pourrais pas rester auprès d'une fille aussi soupe à la citrouille, j'aurais abandonné depuis longtemps, même si j'étais amoureux.

          _ Attends d'être amoureux Sirius, répliqua Remus, tu verras que certaines fois cela nous pousse à faire des choses impensables.

          _ Sirius a raison, Remus, approuva James, je ne me comprends pas moi-même. Je sais que je suis têtu mais, là, il faut plus que de l'entêtement. En fait, je crois que c'est à cause des problèmes qu'elle a. Sa possession. J'en ai suffisamment lu sur la manipulation des rêves pour savoir que ce n'est pas une pratique courante. Les rêves servent à entrer dans l'esprit. Ils gravent ton subconscient. C'est peut-être même encore plus puissant que la légilimencie.

          _ Et tu espères secrètement que c'est la « rêvimencie » qui la détourne de toi, compléta Sirius. 

Il acquiesça légèrement, quelque peu honteux.

          _ Et vous les mecs, pourquoi vous dormiez sur le canapé ? On aurait pu parler de ça demain, rien ne pressait !

          _ En fait si, informa le jeune préfet-en-chef, Dumbledore m'a confié ce parchemin et il m'a dit de te le remettre le plus vite possible.

C'est à ce moment-là que James remarqua le bout de papier jauni dans la main de son ami lycanthrope. Décidément, quand on parlait de Lily, il n'avait plus aucun sens de l'observation.

          _ Qu'est-ce que nous ne ferions pas pour notre Jamesie, prince de la contrée de Poudlard ! Nous, chevalier de la Marauderie, sommes toujours prêts à se sacrifier et à veiller sur la missive précieuse du grand mage ! s'exclama Sirius d'un air dramatique.

          _ Comment fais-tu pour sortir des âneries moyenâgeuses dès ton réveil, toi ? demanda Remus sans vraiment se poser la question.

          _ Ils n'ont qu'à faire d'autres cours que ceux sur les légendes moyenâgeuses du roi Arthur en étude des moldus, répliqua Sirius. 

          _ Toi, tu lis un truc et après tu le débites comme un perroquet, le nargua James en prenant le parchemin qui lui était destiné.

          _ Un perroquet avec un humour excellentissime, alors !

Mais déjà, le jeune homme à lunettes n'écoutait plus les chamailleries de ses amis. Il lut la lettre du professeur avec attention.


Cher Mister Potter,



            Comme promis, je tiens à vous informer de l'avancée des dures recherches que nous faisons pour trouver le criminel responsable des maux de miss Evans. La marque est bien une caractéristique de magie noire mais elle l'est aussi d'un don magique et non pas d'un sort. Le criminel a un "somnia potestatem", c'est-à-dire un pouvoir de rêve. 

Malheureusement, aucun élève de Poudlard n'est répertorié avec cette capacité. Nous avons cependant quelques pistes car le choipeaux magique est doté d'une capacité à deviner les futurs dons des sorciers qu'il coiffe. Par souci de discrétion, nous ne vous donnerons pas la liste. De plus, elle est très hasardeuse car la prédiction de dons n'est pas une science exacte. 

Pour finir, j'ai bien eu la confirmation d'un autre de mes soupçons, nous ne pouvons rien dire à Miss Evans à propos de la possession de ses rêves, elle pourrait, pendant son sommeil, se débattre contre cette force qui m'a l'air puissante et pourrait en mourir. La solution de l'ignorance n'est pas la meilleure mais je me vois dans l'obligation de vous intimer le silence, ainsi qu'à Mister Black, Lupin et Pettigrow car je sais que vous leur confiez tout.

Sachez que cette missive sera brûlée après la fin de votre lecture. Je vous conseille évidemment de n'en parler qu'aux personnes en qui vous avez une totale et inébranlable confiance, il en va de la vie de Miss Evans.

Nous vous informerons si l'énigme s'éclaircit.



Mes plus sincères et distinguées salutations,

Albus Dumbledore.


 Le jeune étudiant regarda distraitement la lettre se consumer d'un feu magique.

          _ Alors James ? demanda Remus après quelques minutes, remarquant aucune réaction de la part du jeune brun.

Le jeune homme en question leva la tête et leur fit un résumé. 

          _ Je fais quoi les gars ? leur demanda-t-il après un petit moment de silence.

          _ Comment ça ?

          _ Je la fuis ? Je la repousse si jamais si on se recroise ? Je laisse faire ?

          _ C'est vrai que c'est compliqué, affirma Remus en pleine réflexion au vu de la ride entre ses deux sourcils, il semblerait bien que tu aies déjà essayé de t'éloigner d'elle mais tu n'as pas l'air d'avoir grandement réussi. Il est vrai qu'en vivant encore sous le même toit qu'elle, si je puis dire, cela ré-ouvre ta blessure. Difficile de résister surtout dans le degré d'amour où tu te trouves. Tu as une capacité d'aimer qui est très belle quand on y pense, malgré tout ce qu'elle t'a fait endurer, tu continues à l'aimer. C'est rare d'aimer au point de ne pas être rancunier.

          _ Je t'arrête tout de suite, j'étais à deux doigts d'arrêter quand elle m'a jeté à l'infirmerie. Seulement tu as raison, la voir ne m'a pas aidé. Je pense que si je l'avais aimée en dehors de Poudlard, j'aurais pu plus facilement l'oublier.

          _ Je ne pense pas, contra Remus en souriant mystérieusement, on parie que si elle était revenue à une soirée plusieurs mois après, ton cœur aurait battu tout aussi vite qu'au premier jour ? Et que si elle s'était trouvé un autre homme à aimer, malgré tout le bonheur que tu lui souhaiterais, ça te tuerait de les voir ?

James n'essaya même pas de faire cette simulation dans sa tête, il savait pertinemment que Remus avait raison.

          _ Donner son avis est compliqué, continua le jeune homme aux yeux couleur miel, mais je te dirais Carpe Diem, cueille le jour, autrement dit, prends ce qu'elle te donne pour peu que ça te rende heureux. Et puis qui sait, peut-être le « somnia potestatem » la sépare de toi. Auquel cas, quand tout ça sera fini, tu auras peut-être la possibilité de tenter quelque chose avec elle. Vous m'avez appris à être positif quand je voyais tout en mal à cause de ma lycanthropie, vous vous rappelez ?

          _ Oui on s'en souvient Rem', mais ce n'était pas pareil, répliqua Sirius, j'adorais cette petite rouquine à l'époque où elle traînait avec nous, elle avait arrêté d'être miss préfète-en-chef et n'était pas encore devenue la           _ excusez-moi du terme           _ folle d'aujourd'hui. Elle était fun et ne faisait pas souffrir mon poto. Maintenant, elle est différente et même si je souhaite son bonheur, tu vas te ramasser si tes espoirs ne se réalisent pas. Tu n'es pas son chien, elle ne peut pas venir t'apporter ta croquette et repartir. Ce n'est pas très sain et je répète, je n'arrive pas à comprendre comment tu la supportes encore.

          _ Merci d'avoir été francs les mecs en tout cas. Je suis dans une belle bouse de dragon, soupira Potter.

          _ En parlant de ça, répondit Sirius, ça me fait penser que demain tu vas en être dans une autre. Candy était furieuse de ne pas savoir où tu étais et elle nous a pas lâché la grappe ! Apparemment, Madame la Baronne s'attendait à avoir un Samedi câlin ou plus communément appelé Samedi en Enfer

Ils se mirent à rire. Après s'être calmés, ils décidèrent d'aller monter se coucher.

          _ Hey les gars, on dit rien à Peter à propos de la « rêvimencie » ? demanda le jeune Black dans les escaliers.

          _ Je dirais même, ne lui racontons rien de cette soirée, précisa James, il a du mal à tenir sa langue alors autant ne pas l'embêter.

          _ Je comprends toujours pas comment t'as tenu pour juste l'embrasser si elle était nue, remarqua pensivement Patmol.

          _ J'ai acquis une certaine maîtrise de mon désir depuis cette histoire de sous-vêtements...

          _ Tiens d'ailleurs, tu vois toujours Evans en sous-vet' ?

          _ Non, c'est fini depuis l'infirmerie, je m'en suis rendu compte il y a un petit moment.

          _ C'est louche cette histoire-là aussi, tiens !

          _ À qui le dis-tu, s'exclama James, on dirait que rien de normal ne peut m'arriver !

          _ Ouais, mais comme on est les Maraudeurs, on finit toujours par tout faire rentrer dans l'ordre. Moi je te dis, quand on sera Auror, les missions seront de la routine vu ce qu'on a déjà vécu !

          _ Quelle vantardise Patmol, soupira Remus.

          _ Et après c'est moi la tête enflée, remarqua James, faussement consterné.

Ils rirent encore fois avant d'atteindre leur chambre puis ils s'endormirent rapidement.

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